Surnommés affectueusement « les matheux » par l’équipe pédagogique, Jeanne, Tony et Alain, trois enseignants en mathématiques de l’institut nous parlent de leur nouvelle aventure pédagogique.
Pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Nous sommes 7 enseignants et enseignants-chercheurs en mathématiques et nous collaborons ensemble autour des trois années de cours de la licence de l’institut.
Quelles pratiques pédagogiques avez-vous mis en place ?
Afin de faciliter l’apprentissage des étudiants, nous avons mis en place un certain nombre de pratiques dont vous pouvez retrouver les fiches recettes ci-dessous :
Les TDs différenciés : les étudiants ont le choix entre plusieurs formats d’enseignement (magistral, autonomie supervisée, correction d’exercices en petits groupes). Ils choisissent d’aller et venir librement entre ces différents formats quand ils le souhaitent.
L’évaluation par savoir-faire : le programme est découpé en savoir-faire élémentaires que les étudiants valident tout au long du semestre. Ces validations sont transformées en notes à la fin du semestre.
Enseigner à son rythme : cette méthode permet aux étudiants d’avancer à leur rythme en fonction de leurs acquis antérieurs et de leur motivation.
Classe inversée en groupe : Apprentissage mêlant travail à la maison pour préparer des séances et travail coopératif en groupe.
Réactivation des connaissances : une question type QCM est posée aux étudiants. Réflexion individuelle suivie d’un vote et d’un temps de débat entre les étudiants. Puis, deuxième temps de réponse, pour voir l’évolution de la réflexion suite à l’échange entre les étudiants (durée totale : 15 minutes max).
Raisonnement en maths : décortiquer un raisonnement mathématique en termes d’hypothèses/buts et leurs traductions mathématiques. L’idée est ici de ne pas se focaliser sur la résolution d’un exercice mais sur les enchaînements de la preuve.
En quoi consiste cette nouvelle pratique ?
Nous avions prévu initialement de mettre en place des cours à la rentrée, programmés en même temps, pour que les étudiants puissent s’entraider au sein de leur promotion ou avec les autres promotions.
Nous avons voulu profiter de la période du confinement pour tester ce dispositif, en ligne cette fois-ci, sur Discord, avec du contenu facultatif de révision, pour que les étudiants puissent prendre de l’avance sur les cours des années suivantes, ou faire du hors programme.
Des étudiants volontaires ont formé avec d’autres étudiants, des groupes de travail fixes de 3 ou 4 membres. Chaque groupe se réunit régulièrement sur son channel textuel et vocal dédié sur Discord et détermine, avant et pendant chaque séance, des objectifs communs de travail (exercices, travail sur un polycopié, vidéos…).
Lorsqu’un groupe travaille sur un thème, il est amené à poser ses questions à un groupe tuteur (un groupe qui maîtrise un ou plusieurs thèmes). Les interactions entre étudiants (quelle que soit leur promotion) sont ainsi encouragées. Si une question pose problème à un groupe tuteur, l’enseignant peut alors venir éclaircir certains points.
Quand il n’est pas sollicité, l’enseignant peut parcourir librement les groupes pour voir s’ils ne passent pas à côté de points essentiels, s’assurer de la compréhension d’un point particulier en demandant dessins/illustrations/exemples (et éventuellement renvoyer vers un groupe tuteur en cas de non réponse), ou encore, dans des cas extrêmes, poser une question bien roublarde pour faire sentir que l’enseignant reste une personne indispensable. 😉
Sur quoi travaillez-vous actuellement ?
Nous souhaitons mettre en place un cours “interpromo” dans lequel les étudiants des différentes promotions de l’institut pourraient s’entraider. Cette nouvelle pratique reprendrait plusieurs spécificités des pratiques que nous avons déjà mis en place (voir fiches recettes au-dessus).
– Les groupes avanceraient à leur rythme en suivant un planning prédéfini. Ils se fixeraient eux-mêmes leurs objectifs.
– Les étudiants pourraient préparer (s’ils le souhaitent) une partie du cours en solo et la retravailler lors des séances en groupe : débat, questions, explications + groupes tuteurs pour l’entraide.
– L’enseignant proposerait des points de cours pour aider ceux qui le souhaitent.
– Les étudiants travailleraient sur des supports de cours et, notamment, sur la compréhension détaillée des preuves, ce qui favoriserait le raisonnement.
Est-ce que ça marche ?
Nous avons conscience que les étudiants présents à ces cours facultatifs sont les plus motivés. Cependant, nous constatons une dynamique prometteuse en vue des échéances futures.
Au sein des groupes, le travail est sérieux et appliqué. Les étudiants ne sont pas pour l’instant très nombreux et pourraient se reposer sur nous, mais, ils utilisent plutôt le système de tutorat afin de se questionner. Nous avons notamment entendu de bonnes questions de L1 posées aux L3 par exemple.
Néanmoins, il ne faut pas oublier l’importance de l’enseignant dans ce système. Les étudiants ne sont pas nécessairement capables d’isoler tous les points cruciaux d’un cours. Il est donc nécessaire que l’enseignant passe et teste ces points avec des questions précises. Si ses questions restent sans réponse, il pourra dans ce cas renvoyer l’étudiant vers un groupe tuteur.
Ce dispositif encourage naturellement, celles et ceux qui sont motivés, à acquérir des connaissances des années suivantes ou hors programme. Également, plusieurs étudiants en difficulté ont trouvé une réelle motivation à travailler en groupe et à se faire aider dans leurs révisions.
Un conseil à adresser aux enseignants qui souhaiteraient tester ce dispositif ?
Ce n’est que le début de notre exploration. Nous attendons encore de voir comment le dispositif se déclinera dans le temps, et comment il fonctionnerait dans le cadre d’un cours obligatoire. Comme tous les formats nécessitant du travail en autonomie, il est nécessaire d’avoir des supports de cours assez complets sur lesquels les étudiants peuvent travailler (ça peut être aussi une motivation pour retravailler ses supports…). Une fois les outils de suivi créés, l’encadrement ne demande pas beaucoup de travail supplémentaire en dehors des séances.
C’est dans tous les cas très motivant de travailler en équipe sur ce nouveau dispositif qui nous permet de garder un lien avec nos étudiants en cette période difficile. Ils sont très engagés et nous sommes heureux de les voir travailler et progresser.
Si jamais vous avez des questions ou si vous avez envie d’échanger avec nous, n’hésitez surtout pas !
Tony Février tony.fevrier@u-psud.fr
Jeanne Parmentier jeanne.parmentier@universite-paris-saclay.fr
Alain Virouleau alain.virouleau@universite-paris-saclay.fr